Maxence et sa famille

Manque de maturité.

Avec un enfant né fin décembre, quoi de plus facile que de mettre le moindre signe de difficultés scolaires sous ce constat ? Un moment nous y avons cru et puis, c’est vrai que dans les petites classes de maternelle les mois peuvent faire la différence. Même notre première orthophoniste consultée dès la grande section s’y est rangée. Tombant en plus sous le charme de notre enfant, elle en a oublié son rôle de rééducation passant plus de temps sur l’aspect psychologique qu’autre chose et ne manquant pas de nous culpabiliser au passage !

2014 : pour Maxence, c’est l’entrée au CP. Ne sachant reconnaître que quelques lettres de l’alphabet, nous sommes inquiets. L’année passe et devant les difficultés croissantes, la maîtresse nous alerte à juste titre. Maxence fait de nombreux efforts mais il ne lit que quelques syllabes. En avril, nous demandons l’avis de notre orthophoniste qui atterrit alors : « quoi, il ne lit toujours pas ? ». Pas le temps de lui laisser réorienter son travail : devant son incompétence, nous décidons d’arrêter un temps sa prise en charge.

Un enfant fainéant !

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2015 : c’est l’entrée en CE1. La lecture est très lente et difficile, l’alphabet est maîtrisé mais avec des inversions de lettres « b/p; d/q » et de sons « on/an ». Nous laissons septembre passer. En octobre, sans surprise, le maître nous convoque. Le travail de Maxence est très variable. Nous avons alors le droit au fameux « Quand il veut, il peut. Votre enfant est intelligent, capable, mais il est fainéant. ». Non sans blague ! Merci Monsieur le professeur, intelligent malgré ses difficultés : nous n’en doutions pas, mais fainéant NON ! Maxence fait tous les jours ses devoirs et y passe beaucoup de temps, sans jamais rechigner et toujours avec une sacrée envie d’apprendre mais il fatigue très vite. En tant que maman, je ne peux accepter ça. Au prix d’un week-end entier sans dormir, surfant sans relâche sur le net, je cherche une réponse. Hasard du calendrier, c’est la journée de la dyslexie. Un reportage aux informations me met sur la piste. Mais il est souvent dit « pas de diagnostic dys possible avant la fin du CE2 car cela nécessite de constater un retard de deux ans en lecture ». Pas question d’attendre ! Maxence ayant été opéré par deux fois d’un strabisme vertical, je cherche alors un lien entre la dyslexie et les yeux.

Les prismes, « c’est magique »

C’est alors que j’entends parler pour la première fois du traitement par lunettes équipées de prismes. Je prends alors contact avec un ostéo-posturologue et une orthoptiste formée aux méthodes portugaises des docteurs Da Silva et Da Cunha. Les premiers tests en cabinet sont flagrants et très visibles. Prismes sur les yeux, cale sous les pieds, son corps se redresse, Maxence a plus de force dans les mains. Incroyable. Tentons l’expérience.

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2016 : dès le mois de janvier, Maxence porte des prismes. Première demi-journée à l’école, « C’est magique », me dit-il en rentrant ! Une phrase que je n’oublierai jamais. Mais le chemin sera long et parsemé d’embûches. Peu à peu, il reprend confiance, nous essayons en parallèle une méthode de réapprentissage de la lecture pour les dys et les progrès sont là, même si cela reste très fragile. Aux difficultés de lecture s’ajoutent maintenant des soucis en écriture. Un œil qui s’effaçait au profit de l’autre lui permettait peut être de bien écrire (lentement tout de même) mais surtout le menait potentiellement sur le chemin de l’amblyopie (vision d’un seul œil) comme sa maman ! Alors tant pis, pour l’écriture on verra plus tard.

Par manque de temps, nous n’avons pu mettre en place  la suite du traitement (semelles,etc.). Mais en septembre, chamboulement pour la famille avec un déménagement à 800 km. Nous quittons alors la Bretagne pour la région lyonnaise. C’est le moment de retrouver des praticiens et de reprendre l’orthophonie, indispensable pour consolider les apprentissages. Changement d’école aussi avec, cette fois, une institutrice bienveillante pour le CE2. Les difficultés sont présentes mais les efforts sont ressentis. Un bilan avec la psychologue scolaire est demandé par l’école, nous acceptons. Résultats : un WISC IV non interprétable tant Maxence peut exceller ou être très mauvais dans un même domaine ! Côté orthophoniste : beaucoup d’items dépassent le seuil pathologique en langage écrit (voir photo). Sans surprise pour nous.

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Mais quelque chose cloche encore, Maxence stagne. Je décide alors d’envoyer le questionnaire préalable à la consultation du Dr Q. à Beaune.

La prise en charge complète

2017 : Maxence a son diagnostic officiel « syndrome de dysfonction proprioceptive » grade 9/10. Le déroulé du  bilan nous rassure. Maxence est entre de bonnes mains.  Au retour à la maison, nous sommes partagés entre joie de cette prise en charge complète et découragé par tout ce qu’il faut mettre en place. Nous avons été prévenus, nous nous y attendions mais nous l’avouons, ce n’est pas toujours facile. Nouveaux prismes avec lunettes incurvées et réglage au millimètre, semelles proprioceptives, plan incliné à la maison et à l’école, marche pour les pieds et exercices de respiration accompagnés de la position d’endormissement. Une chance, notre enfant est un battant, il est motivé et il applique tout à la lettre très consciencieusement, cela l’aide beaucoup. Les progrès reprennent de plus belle.

Pour les devoirs, hormis les poésies, on se focalise sur la lecture et un peu sur l’orthographe, le reste est laissé de côté, Maxence fatigue beaucoup, nous ne pouvons pas lui en demander plus. Assez concentré en classe, il ne mémorise pas trop mal. Les maths, il maîtrise, c’est déjà ça. L’institutrice fournit des polycopiés parfois, je les retape en police plus adaptée et plus grande, cela demande du temps mais facilite le travail. Quand Maxence écrit c’est illisible et l’orthographe entre et ressort de sa mémoire.

Des progrès en continu

Entrée en CM1, un autre instituteur bienveillant. Les devoirs sont mis en ligne (ça aide bien !), certaines leçons sont tapées à l’ordinateur ou à trous. Maxence écrit quand même, notamment lors des exercices.  Le premier trimestre se passe au prix d’une grande fatigue qui causera son absence  une semaine avant les vacances de la Toussaint puis de Noël puis en février (car il est aussi malade des bronches et c’est le cercle vicieux fatigue/maladie/fatigue). Sur les conseils de l’orthophoniste et d’une rééducatrice en écriture, nous demandons que Maxence écrive le moins possible afin de diminuer sa fatigue et lui permettre de se concentrer sur ses apprentissages, en bref : éviter la double tâche car il est capable de bien écrire mais dans certaines conditions : en étant au calme, reposé et en lui dictant les lettres. Son instituteur n’est pas convaincu, il faut alors nous battre. Maxence se sent soulagé quand il écrit moins, le maître dit qu’il ne se concentre pas.  Au contraire, certes il bouge et tripote ses crayons mais le soir en rentrant il me raconte ses leçons ! Une réunion au printemps suit pour monter un dossier MDPH. Suivi toujours par le Dr Q., le podologue, l’orthodontiste, le kiné, Maxence fait des progrès en vitesse de lecture. On peut alors se mettre à revoir à la maison un peu d’histoire-géo, un peu de sciences, d’anglais, enfin !

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CM2, Maxence reprend sa place

Entrée en CM2 en septembre 2018, Maxence a la chance de tomber sur LA maîtresse. A l’écoute de ses besoins. Devoirs en ligne, leçons polycopiées en police adaptée dès qu’elle le peut ou écriture des leçons pour Maxence dans ses cahiers, dictées à trous… Maxence est écouté et aidé ! Il est soulagé, moins fatigué donc moins malade, le traitement proprioceptif continue ses effets positifs.

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Malheureusement en octobre, le dossier MDPH est refusé. Le handicap avéré de Maxence et la reconnaissance du besoin d’un ordinateur ne nécessiterait pas d’aide (financement de l’ergothérapie indispensable et de l’ordinateur pour le collège refusés !). Maxence est de fin d’année et n’a pas redoublé, ses résultats corrects grâce à ses gros efforts, les adaptations au bon vouloir des instituteurs et mon aide à la maison ne plaident pas en sa faveur. Les écrits mis sous le nez de la Commission du handicap parlent d’eux-mêmes pourtant. Alors cela va se terminer au tribunal, un souci et du temps en plus. En attendant, nous achetons un ordinateur et finançons le début des séances d’ergothérapie. Maxence apprend vite et l’ordinateur uniquement pour les devoirs à la maison dans un premier temps nous soulage énormément. Maxence réussit à 90 % à réaliser tous les devoirs demandés. Et cette année, petit miracle grâce au traitement, mon loulou est capable d’apprendre des listes de mots de dictée sans tout mélanger comme avant et ceci relativement vite (une dizaine de mots en deux jours de devoirs) quand il fallait nous acharner plus de 10 jours de suite pour un résultat médiocre. Une grande victoire même si écrire ces mêmes mots dans des phrases hors dictée dans un autre contexte reste difficile, la phonétique garde la main ! Dorénavant, il peut même apprendre ses leçons seuls comme un grand. Je peux même lui demander d’apprendre des définitions quand, avant, on se contentait, quand c’était possible, de lui relire les leçons juste pour voir s’il avait compris. Cela est difficile à expliquer et à comprendre mais nous avons enfin le sentiment qu’il reprend sa vraie place avec ses camarades et non plus qu’il suit derrière tant bien que mal !

Confiants pour l’avenir

A la rentrée 2019 ce sera le collège. Reste une grande angoisse : comment Maxence va réussir à s’organiser avec son ordinateur, pourra-t-il suivre le rythme, les professeurs suivront-ils les adaptations demandées avec un simple PAP si nous n’obtenons pas le PPS ? Nous restons toutefois confiants. Au vu des énormes progrès, notamment entre le printemps de CM1 et le CM2, et du témoignage de Marc sur le site, nous ne pouvons qu’y croire !

Le PPS pour la 6ème

Derniers jours de CM2 pour Maxence, nous sommes enfin convoqués au tribunal pour contester le refus de la MDPH. Devant les écrits de mon loulou et mes explications factuelles, le juge tranche : PPS accordé pour Maxence ainsi qu’une AESH (aide humaine) mutualisée et financement des séances d’ergothérapie jusqu’à la fin de 5e. Après 18 mois, le combat administratif est gagné, juste à temps pour la 6ème. Reste maintenant à faire appliquer les aménagements au collège.

A la rentrée, malgré les informations envoyées dès juin, les professeurs sont peu au courant. Très vite nous remettons une couche et envoyons un document de présentation de Maxence et ses aménagements à chaque enseignant. Une idée de notre présidente de Sensoridys, Corinne, qui nous donne en exemple celui de Marc qu’il reste à adapter.

L’ordinateur remplace alors tous les cahiers (excepté en dessin). Un trieur permet de récolter les documents distribués en classe. Sous la pression de certains profs perdus sans un cahier ou un porfolio, nous ne cédons pas et réexpliquons la nécessité de l’ordinateur exclusif (poids du cartable, impossibilité pour Maxence de prendre des notes manuelles ni de lire l’écriture manuscrite…).

Un bilan positif

Dans l’ensemble, cette année s’est super bien passée malgré quelques couacs inévitables. La volonté de Maxence, son sérieux et son travail, le tout appuyé par la fourniture de cours sur clés usb ou tapés par son AESH, voire les enseignants eux-mêmes, paie : 14,5 de moyenne au 1er trimestre, 15 au second et de bonnes appréciations au 3e trimestre en temps de Covid-19. Et Maxence est parfaitement intégré !

Bien sûr, le soir et week-end à la maison, maman check les cours, remet en forme, crée des cartes mentales et aide à réviser. Cela prend du temps mais Maxence ne cesse de progresser.

Bye bye les prismes

Cerise sur le gâteau en milieu de 6ème. En quelques mois Maxence est moins à l’aise, l’orthophoniste remarque aussi qu’il est moins bien dans son travail avec elle. Rien de bien flagrant mais suffisant pour se poser des questions. Semelles revues, la consultation de proprioception annuelle arrive heureusement et le verdict tombe : Maxence n’a plus besoin de prismes ! Waouh, notre réaction est une grande joie mêlée de peur. On ne s’y attendait pas de sitôt. Le maintien des prismes alors qu’ils ne sont plus nécessaires a eu un effet de retour en arrière, peu intense mais il était temps de consulter. Maxence n’est pourtant pas totalement « guéri », alors va-t-il continuer ses progrès ? Le Docteur nous explique que oui, son cerveau doit juste continuer son chemin de réapprentissage sur les nouvelles bases de son schéma proprioceptif corrigé. Il garde les semelles et continue les exercices respiratoires. En cas de changement nouveau, bien sûr, les prismes pourront être remis si les tests le confirment. La vigilance est de mise.

Evolution de la vue

Les mois passent et Maxence continue sa progression et son épanouissement. En regardant en arrière, ce n’est plus le même. Il s’est redressé et a pris confiance en lui et suit maintenant toutes les matières et fait tous les devoirs.

En toute fin d’année scolaire, néanmoins, un nouvel évènement nous interroge : il se met à enlever ses lunettes devant l’ordi et la télé et nous dit qu’il voit mieux sans. Rendez-vous en urgence. Il a grandi !!!! Ses yeux aussi et son hypermétropie s’est améliorée d’un seul coup. Il pourrait même se passer de lunettes en vision de loin, lui qui en a depuis ses 6 mois !!! Il est stable en prime, les tests le confirment. Il peut enfin choisir des lunettes en plastique et sans plaquettes.

La rentrée en 5ème devrait être plus sereine, même si les enseignants vont à nouveau changer et qu’il va falloir réexpliquer etc

Comme prévu le chemin est long mais positif. A chaque moment où des doutes sur les progrès sont apparus, une vérification des semelles et/ou des prismes a été faite et tout rentrait dans l’ordre. Cela demande du temps, de l’observation et de l’argent pour les déplacements etc. mais cela en vaut vraiment la peine. Et grâce à Maxence, nous avons également pu découvrir que moi, sa maman, et Lia sa petite sœur sommes aussi atteintes de SDP. Nous suivons aussi le traitement et en sommes tout autant satisfaites. Nos soucis ne sont pas dans notre tête comme j’ai pu souvent l’entendre mais c’est bien notre sixième sens qui nous joue des tours, différents pour les uns et pour les autres. Pas trop de difficultés d’apprentissage de la lecture pour Lia mais une douleur à la hanche comme point de départ,  puis une dysgraphie-dysorthographie! Pas de dys pour moi la maman mais de nombreuses douleurs. La proprioception est au début de sa prise en charge, nous espérons vivement qu’elle soit mieux connue et reconnue.