Neurosciences cognitives et Arrogance

Il y a quelques temps, j’ai partagé avec vous sur ce site ma découverte d’un sociologue que j’ai trouvé très intéressant : Stanislas Morel. J’avais trouvé la conférence qu’il avait donné au Centre Jean Piaget, « La dyslexie : une approche sociologique », particulièrement pertinente et passionnante, car elle mettait en perspective tous les enjeux sociétaux autour de la dyslexie. Cerise sur le gâteau, il taclait au passage un chercheur cognitiviste qui n’a eu de cesse de s’en prendre à la prise en charge proprioceptive de la dyslexie, depuis plusieurs années. Alors, bien évidemment, je n’ai pas boudé mon plaisir en écoutant cette conférence !

Et récemment, j’ai découvert une interview où il dresse un portrait au vitriol des neurosciences cognitives et de mon chercheur cognitiviste « fétiche ». Là encore, je me suis régalée en lisant sa réflexion sociétale extrêmement intéressante s’agissant de la mobilisation des neurosciences par l’éducation nationale. Nous ne pouvons que le constater, les neurosciences cognitives qui sont pourtant une science encore très jeune et en perpétuelle évolution, deviennent de plus en plus hégémoniques dans notre société. Elles sont partout, elles entendent expliquer aux enseignants comment enseigner, aux parents comment bien éduquer leurs enfants, etc. « L’ arrogance », pour reprendre le terme de Stanislas Morel, de certains neuroscientifiques cognitivistes (pour ne pas dire neurochiantifiques), leur omniprésence médiatique, leur volonté d’écarter les voix discordantes appartenant à d’autres courants scientifiques, leur insupportable mépris à l’égard de l’expérience des cliniciens, des familles et du terrain, tout cela me met très mal à l’aise. En effet, cela ne révèle-t-il pas une certaine dose d’arrogance que de s’imaginer tout connaître de la manière dont un enfant apprend, en observant son cerveau alors qu’il est allongé, ou parfois assis, dans une machine (fusse-t-elle puissante et coûter une fortune) ou en compilant des données statistiques ? La cognition est incarnée, le cerveau se construit au travers d’un corps qui bouge et qui ressent, dans une perpétuelle interaction avec son environnement. Cela, ce courant des neurosciences semble tout simplement l’oublier. Un peu d’humilité ne nuirait donc pas à certains de ses leaders, pour ne pas dire de ses « papes », tant on a parfois l’impression d’avoir affaire à une vérité intangible, un véritable dogme.

Merci donc à Stanislas Morel de remettre l’église au centre du village. Je ne suis pas forcément d’accord avec tout ce qu’il dit, mais la science et les connaissances se construisent dans la discussion et le débat et cela aussi, certains neuroscientifiques semblent l’oublier.

Je cite un petit extrait de son interview, que j’ai trouvé presque jouissif, mais je vous invite à lire l’article dans son intégralité :

Leurs prises de parole sont très contradictoires. Ils prennent beaucoup de précautions avec les enseignants, mais dans le fond, leur discours est d’une grande violence. Ainsi Franck Ramus, spécialiste reconnu en sciences cognitives et membre du Conseil scientifique de l’éducation, parle d’enseignants qui ne seraient « pas à même d’évaluer leurs pratiques ». De même, il y a une réelle hypocrisie dans le rapport des neuroscientifiques aux autres disciplines. D’un côté, ils assurent qu’ils ont besoin des sciences sociales, mais de l’autre, comme Franck Ramus l’exprime, ils relèguent avec beaucoup de mépris les sciences de l’éducation à un rang infra-scientifique sous le prétexte qu’elles ne sont pas expérimentales et que leurs résultats ne sont pas publiés en anglais… En réalité, les sciences cognitives dominent le monde académique : pour obtenir des financements en recherche, il faut presque automatiquement travailler avec elles. Les chercheurs en sciences cognitives tiennent un discours tantôt arrogant, tantôt lénifiant, alors que leurs expériences menées en laboratoire ne correspondent pas à la complexité d’une salle de classe. Leurs résultats sont donc souvent difficilement transposables.

Lire l’article dans son intégralité : .

A écouter aussi sur le même sujet, cette émission sur France Cuture avec Stanislas Morel : Neurosciences à l’école : la controverse

2 réflexions sur “Neurosciences cognitives et Arrogance

  1. Avatar de francesca vincent francesca vincent

    Bonjour. Notre petite fille a le Syndrome de Kabuki avec comme effet un TDAH AVEC IMPULSIVITEClasse Ulis nécessaire alors qu’elle est s’y ennuie. Apprentissage difficile .Habitant l’île de la Réunion pourriez vous  nous indiquer le meilleur SPECIALISTE TDAH en France pour voir comment mettre en place un traitement à l’approche de l’adolescence. Merci pour votre aide précieuse.  Cordialement

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