Troubles du sommeil, SAOS et TDA/H

Je vous invite à découvrir trois ressources très intéressantes et récentes qui s’intéressent au lien entre TDA/H (le trouble déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité) et Troubles du sommeil, dont le SAOS (syndrome d’apnées obstructives du sommeil).


La première est une conférence donnée par le Pr Stéphanie BIOULAC (CHU Grenoble), lors du congrès du somnoforum 2023, sur le thème « Troubles du sommeil chez l’enfant TDAH ».

On y découvre notamment le lien très fort et extrêmement précoce qui existe entre une courte durée de sommeil dans la petite enfance et le risque d’apparition d’un TDAH. Dans une étude portant sur une vaste cohorte de très jeunes enfants d’âge compris entre 2 ans et demi et 6 ans, il a été observé que les enfants ayant un court temps de sommeil (courts dormeurs persistants < 10h avant 6 ans, ou court dormeur puis augment vers 41 mois) avaient des scores élevés d’hyperactivité/impulsivité et de faibles performances cognitives. Il est donc important de dormir 10H par nuit dans la petite enfance.

Dans une autre étude portant sur des adolescent porteur d’un TDA/H, il a été mis en évidence un temps de sommeil plus court que les contrôles, la semaine comme le week-end, et des heures de coucher plus tardives.

Une autre étude s’est intéressée au lien TDA/H et somnolence diurne, chez des enfants TDA/H d’une moyenne d’âge de 10 ans et a montré une association entre somnolence diurne et un mauvais niveau de qualité de vie et de fonctionnement social. Le Pr Stéphanie BIOULAC évoque aussi le lien, sans doute bi-directionnel selon elle, entre TDA/H et SAOS. Dans sa conclusion, elle déclare que le sommeil doit faire partie de l’évaluation systématique du TDA/H.

D’autres études très intéressantes sont aussi citées, pour plus de détails, je vous invite à visionner cette courte conférence (15 mn) :

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Une Revue de Littérature, datant de 2021, sur les « Liens entre le syndrome d’apnées obstructives du sommeil et le trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité chez l’enfant », réalisée par Marie-Laure CHLEQ pour son mémoire en vue de l’obtention d’un CERTIFICAT DE CAPACITE D’ORTHOPHONIE, m’a été transmise par sa directrice de mémoire Catherine THIBAULT, orthophoniste et psychologue.

Je retranscris ici la conclusion de ce mémoire, soutenu en juin 2021,très intéressant :

Cette revue systématique de littérature a permis l’analyse de treize articles scientifiques traitant du lien entre le SAOS et le TDAH. La présence d’un lien a pu être objectivée et plusieurs études ont permis d’établir et d’expliquer les liens qui existent entre ces deux pathologies. Ainsi, la présence d’un TDAH et d’un SAOS associé s’explique d’un point de vue neuro-anatomique et neuro-physiologique.

Par ailleurs, cette étude confirme l’amélioration des symptômes du TDAH suite au traitement du SAOS par une adénotonsillectomie. L’importance de la rééducation des fonctions oro-myo-faciales chez ces patients a également été mise en exergue.


Cependant, il apparaît clairement qu’actuellement, les liens entre le SAOS et le TDAH ne sont compris que partiellement.


Les résultats de cette revue de littérature ont un intérêt pour la pratique clinique. En effet, une meilleure compréhension des liens entre ces deux troubles devrait amener les praticiens à opter pour une démarche clinique plus globale. Cette démarche passe tout d’abord par la mise en place d’un dépistage systématique de potentiels troubles du sommeil ou attentionnels auprès des patients reçus en cabinet, mais aussi, dans la mesure du possible, auprès des populations d’âges pré-scolaires et scolaires. Cette étude montre, par ailleurs, l’importance des questions posées lors de l’anamnèse, au cours des bilans. Les orthophonistes ont un rôle majeur dans le dépistage de ces troubles, puisqu’ils sont amenés à prendre en charge de nombreux enfants. Enfin, la collaboration entre les différents professionnels, l’information aux aidants et aux patients apparaissent comme des éléments clés de la prise en charge des enfants atteints de SAOS et de TDAH.


La poursuite des recherches est donc nécessaire, notamment à travers la réalisation de travaux pluridisciplinaires incluant pneumologues, médecins ORL, neurologues, pédopsychiatres, neuropsychologues, orthodontistes, orthophonistes, masseurs-kinésithérapeutes etc. De telles recherches pourraient améliorer le dépistage et la prise en charge de ces patients et, ainsi, améliorer leur qualité de vie au quotidien.

Pour découvrir ce mémoire dans son intégralité : .

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Enfin, j’ai aussi découvert une thèse de médecine de Maïté Hanot-Roy, soutenue en 2023, dont le sujet est : « Troubles du sommeil associés aux troubles DYS et/ou TDA(H) : en parlez-vous à votre médecin traitant ? » Cette thèse dépasse le cadre du TDA/H, mais je la trouve aussi très intéressante, car elle démontre bien le lien étroit qu’il existe entre troubles du sommeil et troubles des apprentissages (dont TDA/H).

En voici le résumé :

Les troubles spécifiques du langage et des apprentissages (TSLA) sont aujourd’hui un enjeu de santé publique. L’amélioration des connaissances et des prises en charge est essentielle. Dans ce cadre, l’étude des troubles du sommeil associés est une question émergente. Cependant, ces troubles échappent au bilan neuropsychologique actuel, ce dernier ne comportant en effet aucun item d’étude du sommeil. Ainsi, les objectifs de cette étude consistent à établir un état des lieux des troubles du sommeil associés au TSLA puis de déterminer les attentes des patients dans le cadre d’une consultation de médecine générale. Les réponses aux questionnaires mettent en évidence une prévalence de troubles du sommeil plus élevée chez les patients porteurs de TSLA que dans la population générale, et en particulier chez les enfants. L’insomnie est le type de trouble le plus fréquemment retrouvé. Les enfants présentent aussi une majoration des troubles respiratoires nocturnes. In fine, moins de la moitié des patients présentant des troubles du sommeil consulte spontanément leur médecin généraliste.[…] L’existence de troubles du sommeil associés aux TSLA est un paramètre à considérer afin d’améliorer les prises en charge. Il est aujourd’hui nécessaire de questionner les troubles du sommeil chez les patients TSLA et de discuter d’un dépistage systématique dans le cadre de la consultation de médecine générale.

Je vous invite à la découvrir dans son intégralité : .

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En conclusion, ces trois ressources établissent un lien très étroit et précoce entre Troubles du sommeil et TDA/H (mais aussi Troubles Spécifiques des Apprentissages). Bien sûr, personne encore n’envisage que ces troubles du sommeil très précoces puissent être à l’origine du développement particulier du cerveau de ces enfants. Mais on avance de plus en plus en direction de cette hypothèse qu’explorent certains chercheurs.

Voir à ce sujet le protocole d’une étude, en partie fiancée par Sensoridys, qui vient de se terminer et qui évalue le lien entre troubles du sommeil, proprioception et attention chez l’enfant dyslexique. Nous attendons avec impatience la publication de ses résultats !

Voir aussi la visioconférence du Dr Patrick Quercia, chercheur associé à l’U1093 INSERM CAPS, sur le sujet :

Photo de l’image d’entête Anastasia Zhenina sur Unsplash

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